Affections psychosomatiques : une prise en charge douce et alternative en cure thermale
Les troubles anxieux comme la dépression, le burn-out ou les troubles du sommeil… touchent une grande partie de la population française. La consommation de médicaments psychotropes fait l’objet de nombreux baromètres et de classements qui placent souvent la France dans le peloton de tête. Difficiles à reconnaître, difficiles à soigner, les affections psychosomatiques plongent souvent les patients dans une souffrance permanente qui affecte durablement leur vie quotidienne. La prise en charge psychiatrique et médicamenteuse ne suffit pas toujours et cette dernière peut même exposer le patient à un risque d’effets indésirables accru, voire d’addiction. La cure thermale propose une approche complémentaire ou alternative naturelle.
Affections psychosomatiques : quelle prise en charge ?
18 % des salariés en France affirment avoir été victimes d’un burn-out (1), les troubles anxieux touchent environ 15 à 20 % de la population à un moment de la vie (2), 14 % des Français souffrent d’insomnie chronique (3) … La liste est longue et le coût pour l’Assurance maladie, s’élève selon l’OCDE à 80 milliards par an. La prise en charge la plus courante reste le suivi par un psychiatre ou un psychologue et la prescription de psychotropes. Si les symptômes ne s’améliorent pas, la médicamentation est souvent renforcée ou prolongée et une hospitalisation est parfois envisagée. Au-delà du coût que
cette prise en charge représente, les contraintes et les risques qu’elle peut occasionner sont désormais bien connus. La cure thermale spécialisée dans le traitement des affections psychosomatiques peut apporter une réponse naturelle.
“ Les études montrent qu’à 6 mois,les effets bénéfiques de la cure se prolongent et améliorent
les symptômes. ”
La cure thermale : une prise en charge naturelle et alternative
L’approche par les soins hydrothermaux ne date pas d’hier et les dernières études confirment que l’hydrothérapie permet de traiter les affections psychosomatiques : anxiété généralisée, bromyalgie, stress, burn-out, dépression réactionnelle, voire l’addiction aux benzodiazépines. Le Docteur Olivier Dubois, médecin thermal, explique que « la cure thermale représente une approche complémentaire à l’efficacité démontrée pour le traitement des affections psychosomatiques comme les états anxieux, les états d’épuisement ou les troubles du sommeil invalidants. Les études (4) montrent qu’à 6 mois, les effets bénéfiques de la cure se prolongent et améliorent les symptômes. Au delà des 3 semaines que dure la cure, nous constatons que l’effet thérapeutique se renforce à 2 mois puis s’inscrit dans la durée jusqu’à 6 mois avec une persistance spectaculaire de l’amélioration symptomatique. Un sondage (5) effectué en 2018 auprès de patients ayant fait une cure en 2017 a montré que 31% d’entre eux n’avaient pas jugé nécessaire de renouveler leur cure l’année suivante considérant que leur état s’était normalisé ».

Focus sur l’étude Stop-TAG
L’étude Stop TAG (trouble anxieux généralisé), dont l’objectif a été de comparer l’efficacité du thermalisme à orientation psychosomatique (TOP) à la paroxétine (DEROXAT®) révèle qu’une amélioration significative de l’anxiété est mesurable au bout de 8 semaines après la cure, et l’effet se maintient jusqu’au 6e mois. L’étude montre que la cure s’inscrit comme une nouvelle orientation possible dans le traitement du TAG, notamment lorsque celui-ci se montre résistant ou intolérant aux traitements médicamenteux, ou encore lorsqu’il existe un échec ou des limites aux psychothérapies. L’étude soulève également l’intérêt que pourrait présenter la crénothérapie dans le traitement des somatisations et des états dépressifs associés aux troubles anxieux, ainsi que dans la réalisation du sevrage thérapeutique des psychotropes.

L’approche physiologique et psychologique de la médecine thermale
Les cures thermales psychosomatiques comme toute cure thermale conventionnée, durent 18 jours. Cette durée favorise le repos du patient, l’éloignement physique et le détachement psychologique du quotidien et des potentielles sources
de stress. Les soins prodigués font partie des 72 protocoles identifiés par la convention nationale thermale. Les eaux
minérales spécifiques pour ce type d’affections sont paucimétalliques, calciques, magnésiennes, chaudes ou froides (6). Quatre catégories de soins hydrothermaux sont préconisées : les bains bouillonnants, les douches thermales, les bains en piscine collective et les massages.
“ La prise en charge globale de la cure thermale permet d’associer les soins à des ateliers et à des activités adaptés à la pathologie ”
La prise en charge globale de la cure permet d’associer les soins à des ateliers et à des activités adaptés à la pathologie. Dans le cas des affections psychosomatiques, les soins sont ainsi complétés par des ateliers psycho-éducatifs pour mieux comprendre et mieux connaître sa maladie, par des groupes de parole et un suivi médical et psychiatrique du patient et de sa prophylaxie… Le programme peut varier d’un établissement à l’autre : séances d’exercices physiques pour le réveil musculaire, ateliers spécifiques à la pathologie (fibromyalgie, troubles du sommeil, dépression réactionnelle, burn-out), des ateliers thématiques (nutrition, relaxation, créativité), etc.
Quels soins pour quelles affections ?
• Les bains à eau tiède ou chaude produisent des résultats comparables aux meilleurs antalgiques utilisés pour traiter la bromyalgie (Source EULAR) et pour les chocs psychotraumatiques (en particulier les abus sexuels) ;
• Les eaux riches en lithium pour traiter les troubles psychosomatiques ;
• Massages sous l’eau, exercices en piscine, relaxation, bains pour les personnes en burn-out ;
• Bains chauds à 40 °C pour réduire le niveau de dépression ;
• Bains bouillonnants, douches subaquatiques d’eaux riches en minéraux, massages pour les troubles chroniques du sommeil.
Burn-out : aider le patient grâce à la cure thermale
Si 18 % des salariés affirment avoir souffert d’un syndrome d’épuisement professionnel, 52 % se disent anxieux et 29 % présentent un niveau dépressif élevé (Cabinet Stimulus, 2017). La plupart du temps, le burn-out fait l’objet d’un ou plusieurs arrêts maladie et il est pris en charge par une médication et un suivi psychologique. Pour autant, les patients sont tôt ou tard confrontés à la perspective d’un retour au travail rendu difficile par la prolongation de leur état.
Des études (7) se sont penchées plus spécifiquement sur le burn-out et ont mesuré l’impact de la cure thermale sur l’amélioration des quatre principaux symptômes que sont : la fatigue générale, la détresse psychique, la motivation au travail et la qualité du sommeil. Le Dr. Olivier Dubois constate : « Le burn- out est un état d’épuisement, d’enlisement psychique. Le sujet se sent dans un état d’affaiblissement que sa situation professionnelle, qu’elle en soit la cause ou la conséquence, ne fait que renforcer. Cet état généralement réactionnel, adaptatif n’est généralement que passager. Il nécessite l’arrêt, le repos, la récupération. Autant que possible, la médication est à limiter et l’hospitalisation, trop stigmatisante, est à éviter. La cure a démontré des résultats très encourageants dans l’étude autrichienne de Blasche. En cure thermale, tous les éléments sont réunis: l’extraction du milieu professionnel, le rythme de vie plus adapté, les ateliers psychoéducatifs permettant d’analyser les facteurs de stress ou de fragilité personnelle, la balnéothérapie évidemment dont la sédation et l’anxiolyse sont des facteurs thérapeutiques essentiels et démontrés. Enfin la durée de 3 semaines, minimale, mais adaptée pour permettre la sortie du processus de souffrance.»
Aujourd’hui, la population des curistes se rendant en station pour un syndrome d’épuisement professionnel représente jusqu’à 20 % des effectifs dans certains établissements.
L’étude de Blasche
En 2010, l’Autrichien Blasche démontre dans une étude (7) clinique menée sur 65 patients, l’efficacité de la cure thermale pour réduire significativement le burn-out. L’amélioration est visible enfin de cure, puis à 1 mois et encore à 3 mois après la cure.
La cure thermale : réduire la consommation de psychotropes
Même si la consommation d’anxiolytiques a légèrement diminué ces dernières années, près de 65 millions de boîtes de benzodiazépines anxiolytiques et 46,1 millions de boîtes d’hypnotiques ont été vendues en France en 2015 et 13,4 % de la population française en consomme au moins une fois par an (8), ce qui en fait un enjeu majeur de santé publique.
Antidépresseurs et anxiolytiques comptent parmi les principales approches de traitement des affections psychosomatiques. Parfois, loin de permettre au patient de sortir du tunnel dépression / troubles du sommeil / anxiété généralisée, les psychotropes peuvent générer addiction et effets indésirables qui peuvent être très graves.
Selon une étude de l’Inserm de 2016, 50 % des personnes prenant des benzodiazépines ont connu des effets secondaires comme des difficultés respiratoires, des risques de chute ou des troubles de la vigilance. L’ANSM indique dans son rapport de 2015 que 23 % des effets indésirables graves déclarés avec les benzodiazépines sont des affections du système nerveux (somnolence, comas, convulsions voire, plus rarement, amnésies).
Les soins hydrothermaux procurent au patient des effets analgésiques et antalgiques naturels pouvant se substituer à la prescription de psychotropes en amont, et constituer dans les cas d’addiction, un moyen de se libérer du cycle de la dépendance.
Quel est le coût de l’addiction aux benzodiazépines ?
Le cabinet Jalma a réalisé une étude médico- économique sur le sevrage en psychotropes par la cure thermale. Cette étude a mis en lumière que pour 10 % des patients arrêtant leur consommation chronique de benzodiazépines, l’Assurance maladie réalisait une économie de 1,5 million d’euros sur 4 ans. La cure thermale représente une
alternative aux antidépresseurs pour les dépressions réactionnelles. Les bénéfices d’une cure de 3 semaines sont attestés pour les dépressions liées à un événement de vie. En effet, les résultats de trois études (Constant en 1996, Akinori Masuda en 2005 et Stop-TAG en 2010) confirment l’efficacité pour ce type de symptôme. L’étude Stop TAG montre une atténuation de 54,5 % des symptômes dépressifs à l’échelle MADRS (Montgomery-Åsberg Depression Rating Scale) pour les patients ayant suivi une cure thermale, contre une diminution de seulement 11 % pour les autres patients bénéficiant d’un simple suivi.
“ 80 % des patients ont réduit leur consommation de moitié pendant la cure et 41 % ont arrêté totalement les benzodiazépines 6 mois après la cure «
Elle révèle aussi une baisse de 14 % de la consommation d’antidépresseurs à 6 mois pour les patients en cure contre une augmentation de 25 % pour les autres patients. L’étude SPECTh (9) (sevrage psychoéducatif en cure thermale), quant à elle, met en évidence l’effet de la cure thermale vis-à-vis de la dépendance aux benzodiazépines. Elle a permis d’évaluer sur les 6 mois suivant la cure, les effets sur la consommation de benzodiazépines. Les résultats sont éloquents : 80 % des patients ont réduit leur consommation de moitié pendant la cure et 41 % ont arrêté totalement 6 mois après la cure. Cette réduction des anxiolytiques s’est faite en parallèle de l’amélioration de l’état anxieux et de l’état dépressif des patients. Les patients ayant développé une addiction aux anxiolytiques trouveront dans la durée de cure de 3 semaines des conditions tout à fait adaptées au sevrage : changement de contexte, groupes de parole, suivi individualisé…
La cure thermale, un environnement favorable au sevrage
De manière générale, les stations thermales ont développé un accueil et une prise en charge d’addictions diverses : benzodiazépines, tabac, alcool, etc. L’unité de lieu, de temps et la multiplicité d’actions menées dans le cadre de la cure thermale constituent autant de facteurs favorables pour traiter l’addiction. À partir du moment où le patient fait preuve d’une motivation personnelle, le thermalisme représente une solution tout à fait adaptée.
Une approche pluridisciplinaire particulièrement adaptée à la prise en charge de la fibromyalgie
Si la médecine thermale propose une réponse aux affections psychosomatiques, elle se trouve particulièrement adaptée à la bromyalgie. Bien que le traitement par balnéothérapie ne montre pas d’effet significatif sur l’humeur des bromyalgiques, l’action combinée de celle-ci avec l’éducation thérapeutique et des groupes de thérapie psychocorporelle montre une amélioration sur la douleur, l’enraidissement articulaire et les symptômes psychologiques associés (anxiété, dépression, fatigue chronique, troubles du sommeil…). Deux prises en charge sont d’ailleurs possibles : en orientation Affections rhumatologiques ou en orientation Affections psychosomatiques pour les symptômes affectifs (certains établissements ont développé des protocoles spécialisés associant des soins adaptés et une prise en charge psychologique et/ ou sophrologique). Si c’est nécessaire, il est possible d’associer les deux orientations Rhumatologie et Affections psychosomatiques pour une même cure. Pour cela, le médecin devra préciser sur le formulaire Cerfa la nature de l’affection principale et celle de l’affection secondaire (voir p.20) pour une prise en charge en double orientation.
La prescription
Seules 5 stations thermales possèdent l’agrément affections psychosomatiques (PSY) en France. Certaines proposent des modules ou des mini-cures spécialisés dans la prise en charge de certaines pathologies. La cure peut être prescrite en orientation principale ou en orientation secondaire dans le cas d’une double orientation, comme par exemple dans la prise en charge de la fibromyalgie ou d’une cure post-cancer.
(1)Cabinet Stimulus, 2017
(2)Source : www.ameli.fr
(3)Le temps de sommeil en France, Santé publique France, 2019
(4)Étude Stop-Tag: suivi du Thermalisme à Orientation
Psychosomatique dans le Trouble Anxieux Généralisé, AFRETh
(5)Sondage 2018, Thermes de Saujon
(6)La médecine thermale – Données scienti ques, Pr. Patrice Queneau,
Pr. Christian Roques, Chapitre 31, Addictions, par le Dr. Olivier Dubois,
Éditions John Libbey, 2018.
(7)Blasche G., Association of spa therapy with improvement of
psychological symptoms of occupational burnout, Forsch
komplementmed, 2010
(8)État des lieux de la consommation des benzodiazépines en France,
Avril 2017
(9)Étude SPECTh, AFRETh, 2014